Des CORVETTE et des CHEVAUX
(ou la vérité sur la puissance)
1) – Sur les ailes avant de ma C6 Z06 un sigle indique « 505 HP » mais le vendeur annonce 512 chevaux. Qui croire ?
2) – Le small block LT1 de ma C3 de 1970 développe 370 hp. J’ai vu que le même moteur n’en faisait plus que 330 en 1971 et 255 en 1972 ! 31 % de « perte » en deux ans pour une mécanique identique, c’est invraisemblable !
3) – J’ai passé ma Corvette au banc. La puissance ne correspond pas aux affirmations du constructeur. Pour en avoir le cœur net, je l’ai testée sur un autre banc … qui a trouvé un résultat encore différent !
4) – La « carte grise » de ma C4 indique 33 CV et j’ai dû régler la somme correspondante au fisc. Un ami qui possède une C4 identique n’a été taxé que pour 24 CV !
Toutes ces questions, ou leurs dérivées, vous les avez déjà entendues. Vous vous les êtes peut-être même posées en des termes voisins.
J’ai conscience que le domaine est très vaste et un peu rébarbatif. Il serait déraisonnable de s’attaquer à un sujet aussi complexe dans le cadre d’un magazine de club.
Mais, à contrario, je suis convaincu que le problème préoccupe, peu ou prou, la quasi-totalité des propriétaires de Corvette et que la passion qui nous réunit n’a que faire de la raison.
Tentons donc d’élucider ensemble le mystère qui entoure la notion de puissance d’un moteur d’automobile.
Dès la commercialisation des premières voitures à moteur à pétrole, autour de 1890 (par Benz, Daimler, Panhard et Levassor et Peugeot), la course à la puissance n’a jamais cessé. Le monocylindre Benz développait ¾ de cheval, tandis que le bicylindre Panhard et Levassor licence Daimler, qui deviendra le célèbre « Phénix », offrait 2 chevaux ¾ !
Nous y voilà ! Des « chevaux » pour exprimer le potentiel de ces mécaniques qui prétendent justement les remplacer.
1) Où l’on découvre que l’unité de mesure de la puissance n’est pas unique :
Pour caractériser un phénomène, il faut pouvoir le comparer à d’autres du même type et quantifier leurs intensités respectives. Cela nécessite préalablement de définir une unité de mesure.
Dans le Système International (SI) en vigueur – sauf chez nos amis britanniques qui l’ignorent superbement – l’unité de puissance est donc le cheval … heu, en fait, non ! C’est le watt !
Le cheval-vapeur, c’est son nom, n’a pas d’existence légale ! Cela commence bien ! Il est néanmoins utilisé dans le monde entier, même de l’autre côté de la Manche, pour caractériser la puissance des moteurs. Depuis un siècle, les instances dirigeantes chargées du respect des normes en tous genres n’ont eu de cesse de l’éradiquer au profit du plus réglementaire kilowatt. Mais notre équidé vaporisé a triomphé de toutes les tentatives d’anéantissement. À tel point qu’aujourd’hui, tous les constructeurs expriment la puissance de leurs véhicules en chevaux, avant de l’indiquer en kW sur les documents officiels.
Qui a défini le cheval-vapeur ?
James Watt (1736-1819) !
Vous savez, celui qui a donné son nom à l’unité officielle de puissance …
Cela se passait dans les îles britanniques, à l’époque du développement des premières machines à vapeur, qu’il a largement contribué à perfectionner. Watt a pensé, non sans bon sens, il faut le reconnaitre, que comparer la « force » de ces nouvelles machines à celle de la plus belle conquête de l’homme serait facilement compréhensible par tous.
Selon James Watt :
1 horsepower (hp) équivaut à 745,7 watts (W)
Bien que je sois en mesure de le faire, j’espère que vous ne m’en voudrez pas de ne pas vous révéler par quels calculs Watt est arrivé à ce résultat, ce qui n’a d’ailleurs aucun intérêt dans le cadre de cet article.
Pour être tout à fait complet, je me dois de vous signaler que le très officiel National Institute of Standards and Technologies (NIST) donne cinq valeurs, très légèrement différentes bien entendu, de ce horsepower !
Cette définition n’a, heureusement, pas varié jusqu’à aujourd’hui.
Et qu’advient-il de « notre » cheval-vapeur (ch) ?
Eh bien, il est … légèrement différent ! Mais peut-être vous en doutiez-vous ?
1 cheval-vapeur (ch) égale 735,5 watts (W)
soit 75 kilogrammètres par seconde (kgm/s)
ou encore, la puissance d’un moteur qui élèverait 75 kilogrammes d’un mètre en une seconde
soit, environ, la puissance d’un cheval au coup de collier
Cette définition aussi est demeurée inchangée.
Vous voyez qu’il y a une logique dans tout ceci, elle est seulement différente d’un côté à l’autre de la Manche !
Les symboles de ces unités ne sont pas reconnus par le Bureau International des Poids et Mesures puisque le cheval-vapeur ne l’est pas lui-même. On peut donc écrire indifféremment hp/HP/bhp/BHP ou ch/CH (l’utilisation de cette dernière notation n’est cependant pas souhaitable, la Confédération Helvétique n’ayant aucunement participé à la définition de l’unité). L’usage ou l’habitude privilégient ch et HP.
Nous connaissons maintenant l’unité, ou les deux unités, qui vont nous permettre d’étalonner avec précision nos moteurs.
Nous pouvons ainsi répondre aux inquiétudes de l’heureux propriétaire de C6 Z06 :
1 hp anglo saxon vaut environ (!) 1,013868 ch « reste du monde » (745,7/735,5)
505 hp x 1,013868 = 512 ch
En pratique, si vous avez des difficultés à mémoriser ce coefficient, appliquez 1,4 %, la précision sera très suffisante !
Merci de m’avoir lu jusqu’ici. Ne lâchez pas prise, le plus dur est à venir !
2) Où l’on voit que la puissance est une notion fluctuante :
Si nous avons désormais une valeur étalon, presque universelle, pour calibrer nos moteurs, nous ne savons ni comment, ni sur quoi va s’effectuer la mesure.
Un V8 est une machine très complexe, qui nécessite énormément de dispositifs accessoires pour remplir ses fonctions lorsqu’il est en situation réelle, dans une Corvette. Cette remarque est aussi valable pour les autres moteurs propulsant les autres voitures, mais avouez que cela présente beaucoup moins d’intérêt à nos yeux …
Comme de coutume, lorsqu’il s’agit de standardiser une procédure à l’échelle mondiale, les nations y vont chacune de leur propre réglementation, espérant l’imposer aux autres. À ce petit jeu, trois pays se sont distingués :
– les États Unis, avec la Society of Automotive Engeneers créée en 1905, devenue SAE International (SAE)
– l’Allemagne, avec le Deutsches Institut für Normung fondé en 1917 (DIN)
– l’Italie, enfin, avec la Commissione Unificazione e Normalizzazione Autoveicoli (CUNA)
SAE :
D’après la norme SAE J245, en vigueur jusqu’en 1971, la puissance est mesurée en sortie de vilebrequin, sur un moteur « nu » et dépourvu de système d’échappement.
À partir de 1972, la norme SAE J1349 prend la relève. Elle s’inspire largement de la norme DIN, à quelques détails près toutefois, il faut bien garder quelques particularités !
DIN :
Selon la norme DIN 70020, la puissance est mesurée à l’embrayage, le moteur, de série, étant équipé de tous les accessoires nécessaires à son fonctionnement dans le véhicule, ainsi que de son système d’échappement, mais pas des consommateurs d’énergie de « confort ». Parmi ceux-ci on peut citer les dispositifs de climatisation et d’assistances diverses.
Le cheval-vapeur allemand se nomme pferdestärke (littéralement : cheval puissance). Son symbole est PS (1 PS = 1 ch, il s’agit, une fois n’est pas coutume, d’une stricte égalité).
CUNA :
Les Italiens ont utilisé leur propre norme, sorte de moyen terme entre SAE « première manière » et DIN, principalement pendant les années 1960-1970.
En substance, jusqu’en 1971 la norme SAE permettait d’annoncer une puissance environ 15 % à 20 % supérieure à la norme DIN pour un même moteur. La norme CUNA se situait entre les deux.
Depuis 1972, les chiffres SAE et DIN sont sensiblement équivalents, avec un léger supplément « d’honnêteté » pour la norme allemande. Les puissances CUNA ne sont plus utilisées.
Les protocoles de mesure sont différents. Il n’existe pas de coefficient de conversion permettant de passer d’une norme à une autre.
Toutes ces mesures s’appliquent à des moteurs testés sur bancs statiques, hors du véhicule.
Ces normes diverses et évolutives n’ont aucune influence sur les unités, qui restent le cheval-vapeur ou le horsepower. Elles n’influent que sur le protocole de mesure.
Il n’existe pas de « hp SAE », ni de « ch DIN ». Je vous entends déjà me rétorquer que c’est pourtant ce que vous lisez quotidiennement dans toutes les fiches techniques. Eh bien, c’est faux !
Il s’agit en fait d’un raccourci simplificateur, que tous ont adopté par facilité, sans se préoccuper de sa légitimité. On devrait écrire, par exemple « 505 HP déterminés selon la norme SAE ». Mais c’est sans doute trop long pour notre époque où tout va de plus en plus vite, sauf les voitures ! (pardonnez-moi cette remarque acerbe, mais ô combien vraie, que je n’ai pu réfréner).
La seule notation abrégée acceptable est de la forme : 659 ch (DIN), la norme utilisée étant entre parenthèses.
Comme on pouvait s’y attendre, pour ajouter à la confusion générale, rien n’a été prévu pour indiquer à quelle norme SAE il est fait référence. La plus grande prudence est donc de mise concernant les voitures d’avant 1972.
Il est temps de calmer les angoisses du très heureux propriétaire de la C3 LT1 de 1970 !
Ce fabuleux small block ensorcelé développe 370 hp « 1970 ».
En 1971 il n’est plus crédité que de 330 hp. Onze pour cent de déficit en un an ! Dus aux premiers effets de l’antipollution qui a imposé des adaptations dynophages (ne cherchez pas ce néologisme dans le dictionnaire, il ne s’y trouve pas, à l’instar de chronophage que beaucoup utilisent pourtant) en vue de l’alimentation à l’essence sans plomb. Rien à voir, donc, avec la mesure de la puissance en elle-même.
Pour 1972, nouvelle déception, le fringant V8 n’affiche plus que 255 hp ! Encore vingt-trois pour cent de perdus ! Cette fois c’est majoritairement l’effet du changement de la norme SAE, mais également, pour une faible part, la suite de l’application des normes antipollution. Les moteurs très performants sont plus affectés par ces modifications que leurs cousins moins affutés.
Je ne sais combien de courageux lecteurs m’ont suivi jusque céans. Merci à vous, le plus pénible est fait !
3) Où l’on perd ses dernières certitudes concernant la puissance :
Nous savons maintenant comment exprimer la puissance et dans quelles conditions en effectuer la mesure. Mais concrètement, comment procéder, avec quels instruments et pour quelle précision espérée ?
On ne sait pas mesurer la puissance ! Trois pages d’explications alambiquées pour en arriver là …
Rassurez-vous, si la puissance ne peut être mesurée directement, elle est déduite du couple et du régime de rotation. Il faut donc mesurer le couple (la force) et le régime du moteur. Pour cela les bancs d’essais mécaniques possédaient un frein équipé d’un dispositif de mesure. C’est la raison pour laquelle on parlait de puissance « au frein ».
L’électronique et l’informatique ont profondément modifié les bancs de puissance « classiques », qui déterminaient la puissance du moteur hors du véhicule.
Mais surtout, ce bouleversement technologique a permis l’émergence et la multiplication rapide des bancs à rouleaux, qui estiment la puissance du moteur d’après les mesures effectuées sur les roues motrices.
Il s’agit bien d’une estimation. Si j’insiste ainsi c’est que, contrairement à ce que l’on voudrait nous laisser entendre, aucun banc à rouleaux, aussi moderne et sophistiqué soit-il, ne peut déterminer avec précision les pertes engendrées par la transmission. Ajoutons à cette incertitude déjà fort gênante, les importantes variations d’étalonnage et de méthodologie constatées chaque jour par les clients utilisateurs et nous voyons que les résultats chiffrés sont à prendre avec circonspection. Et je considère ce terme comme un euphémisme …
Selon qu’on la teste sur un banc « sévère » ou « optimiste », une même Corvette se verra attribuer des puissances différentes.
Les bancs à rouleaux sont néanmoins très utiles pour apprécier les bienfaits d’une transformation ou d’une optimisation mécanique. Un test avant-après réalisé sur un même banc fournira des chiffres comparatifs précis, à défaut de valeurs absolues exactes.
Le seul moyen de connaitre la vraie puissance d’un moteur est de le passer sur un banc classique bien étalonné, hors de la voiture. Opération évidemment très contraignante et coûteuse ! En pratique, on ne peut se permettre cela que lors d’un changement, d’une réfection totale ou d’une préparation « lourde » du moteur. Dans tous les autres cas, les bancs à rouleaux permettront de « situer » une voiture par rapport à ses concurrentes ou à ses semblables.
Mais ce moteur, celui de notre Corvette, dont nous cherchons à connaitre la VRAIE puissance, croyez-vous que ce soit un modèle de constance ? N’a-t-il pas des sautes d’humeur, des états d’âme, des « jours sans », comme nous tous, qui influenceraient son rendement ? Si je pose ingénument ces questions, c’est que les conditions extérieures, principalement la température, la pression atmosphérique et le taux d’humidité de l’air, modifient considérablement la puissance fournie.
Au temps, pas si lointain, des carburateurs – jusqu’en 1981 pour les C3 – les conditions atmosphériques et l’altitude perturbaient sérieusement les V8. L’injection électronique, qui ne cesse de multiplier les capteurs et d’augmenter les possibilités des calculateurs, gère actuellement le fonctionnement du moteur avec beaucoup plus de finesse. Il n’en reste pas moins vrai qu’un moteur non suralimenté (sans compresseur) n’atteindra pas les mêmes performances s’il pleut (pression atmosphérique faible) ou si le temps est plus ensoleillé (pression atmosphérique élevée). Les bancs de puissance modernes tiennent évidemment compte de ces facteurs et corrigent les résultats … dans la mesure du possible ! Encore une source d’imprécision.
Autre cause de variation de la puissance développée : la vitesse du véhicule.
Là, les lecteurs attentifs que vous êtes, s’insurgent : « Il nous répète avec insistance que seul le banc fixe peut mesurer exactement la puissance d’un moteur, hors du véhicule, et maintenant il prétend introduire un nouveau paramètre qui serait la vitesse ! »
Vous avez raison … et moi également ! Car, en général, plus une voiture de sport va vite, plus son moteur fournit de puissance. Une raison simple à cela, lorsque la voiture avance le débit de l’air admis augmente. Cette surpression naturelle provoque, dans de faibles proportions toutefois, le même effet qu’un compresseur. Enfin une bonne nouvelle !
Si les bancs à rouleaux ne donnent pas la puissance exacte des moteurs, qu’en est-il des constructeurs eux-mêmes ? Délicate question !
Sur un même modèle, la dispersion normale des tolérances d’usinage et de montage due à la fabrication en série induit obligatoirement des variations de puissance. Ces précautions oratoires prises, je ne vais pas me cacher derrière mon clavier : les constructeurs « optimisent » les puissances annoncées, dans des proportions variables.
Pour se targuer d’une puissance flatteuse vis-à-vis de la concurrence, il est de bonne guerre d’effectuer les mesures sur un moteur, certes de série, mais bénéficiant de soins un peu particuliers pour en tirer le meilleur parti. Parmi les véhicules commercialisés, quelques-uns atteindront probablement la même puissance, mais la grande majorité restera en deçà. Parallèlement, la fiche technique divulguée au public retient toujours la puissance la plus élevée de toutes les variantes d’un même modèle. Ainsi, aux Etats Unis, les voitures destinées à la Californie sont moins puissantes que celles distribuées dans d’autres états, à cause de normes plus sévères. Pourtant, vous trouverez très rarement la trace de ces différences dans les puissances annoncées.
Habituellement, pour des raisons évidentes, les marques se montrent optimistes dans leur communication sur les puissances. Mais ce n’est cependant pas toujours le cas. Ainsi, le potentiel « officiel » de certains Bigs Blocks de C2 ou C3 a été massivement sous-estimé par Chevrolet. Au début des années 1970, l’automobile en général et les voitures puissantes ou sportives en particulier étaient attaquées de toutes parts. Polluantes, dangereuses, gaspilleuses voire carrément inutiles, le public et les médias brulaient ce qu’ils avaient adoré quelques années plus tôt.
Dans ce contexte hostile, les constructeurs furent contraints de revoir les puissances à la baisse, réellement ou … virtuellement ! Voir (*). Ce subterfuge ne parvint malheureusement pas à sauver durablement le Big Block. Général Motors dut se résoudre à en arrêter définitivement la fabrication. Depuis, aucune Corvette n’a plus reçu l’un de ces moteurs « généreux », pas même la C6 Z06, dont le V8 427 ci (7 litres) est un Small Block « extrême » !
4) Où l’on ne parle plus de puissance mais d’impôts :
La réponse au très, très heureux propriétaire de C4 sera brève.
La puissance fiscale (CV), parfois aussi appelée puissance administrative, qui figure sur les certificats d’immatriculation n’est pas une puissance !
C’est une classification strictement française, uniquement destinée à collecter des taxes. Son mode de détermination fluctue en fonction des préoccupations de l’Etat. Son apparition remonte à 1913.
Rien d’intéressant donc, mais une triste constatation : nos Corvette sont lourdement pénalisées puisque la base de calcul est toujours la cylindrée.
5) La vraie (?) puissance des Corvette :
Pour ne pas refermer ce dossier sur une note aussi déprimante, je vous propose un tableau comparatif des puissances minimales et maximales de toutes les générations de Corvette.
J’ai fixé arbitrairement le coefficient de conversion entre les deux normes SAE à 18 %, valeur très plausible mais toujours discutable, et ramené les résultats en chevaux-vapeur « de chez nous ».
Bien sûr, nous parlons ici de puissance « moteur », la puissance « aux roues » n’a jamais été annoncée par aucun constructeur et ne présente donc pas d’intérêt pour situer un modèle par rapport à ses congénères.
C1 – 1953-1962 : de 129 ch à 309 ch
C2 – 1963-1967 : de 215 ch à 314 ch (Small Block) ou 374 ch (Big Block) (*) 387 ch
C3 – 1968-1982 : de 167 ch à 318 ch (Small Block) ou 374 ch (Big Block)
C4 – 1984-1996 : de 208 ch à 411 ch
C5 – 1997-2004 : de 350 ch à 411 ch
C6 – 2005-2013 : de 406 ch à 647 ch
C7 – 2014-? : de 466 ch à 659 ch
– Les smalls blocks de C1, dopés par l’injection, étaient très performants pour leur époque.
– En regard de la largeur des pneus arrière à structure diagonale de la C2, les 374 ch de son big block impressionnent.
– La C3 fait le grand écart entre le small block anémique de 1975, nous sommes en pleine crise « d’autophobie galopante », et le big block « non dépollué ». Une mention spéciale au LT1 « premier du nom », qui se passe de l’injection mais offre une puissance étonnante.
– La C4 reprend discrètement la course à la puissance, désormais sans le secours des bigs blocks, mais avec l’arrivée d’un OVNI (objet vrombissant naturellement inspirant) le LT5, qui s’installe au sommet de la hiérarchie mondiale. « King of the Hill » est un surnom totalement mérité.
– La C5 est la seule à ne pas être déclinée en une version extrême.
– La C6 « fait sa révolution » avec le LS7, plus gros small block de l’histoire de la Corvette et le LS9 qui adopte le compresseur, pour la première fois en série. Dans les deux cas, le résultat est « décoiffant » !
– La carrière de la C7 est loin d’être terminée et l’arrivée programmée de la version ZR1 en 2017 permettra à la Corvette de dépasser les 700 ch.
Et après ?
Je ne possède pas de boule de cristal et je ne lis pas dans le marc de café, mais il semble cependant que la C8 verra son moteur passer en position centrale arrière. D’autre part, il est fort probable qu’elle ne pourra échapper à l’hybridation.
Il sera peut-être temps, alors, de reparler de puissances exprimées en … kilowatts !
Denis Debessac
Remerciements à Aurélien Pirre, heureux propriétaire d’une « vraie » C2 « 450 HP »
(*) Le premier big block monté dans une Corvette est le L78 396 ci (6,5 litres) de la C2 1965, annoncé à 425 HP. Il cède sa place dès l’année suivante au L72 427 ci (7,0 litres) prétendant à une puissance strictement identique. Enfin … pas toujours !
Les premiers L72 qui ont équipés les C2 « early 66 » revendiquaient fièrement leurs 450 HP. Cette augmentation semble d’ailleurs très logique, la cylindrée ayant elle-même sensiblement progressée. Mais très rapidement, Chevrolet a lancé un rappel pour effectuer une modification des voitures déjà livrées. Une modification importante : le remplacement du sticker « 450 HP » du couvercle de filtre à air par le même mais en « 425 HP » ! Et c’est tout ! Aucune intervention sur les réglages ni, à fortiori, sur des pièces mécaniques. Simultanément, tous les documents techniques et commerciaux sont rectifiés. L’« ancien » L72 fournissait 450 HP à 6400 tr/min, le « nouveau » n’affiche plus que 425 HP à 5600 tr/min !
Cet « attrape-nigaud » – il existe beaucoup d’autres expressions plus imagées pour exprimer la même idée, je vous laisse le soin de choisir celle qui vous convient le mieux – n’est même pas mensonger. Il est logique qu’à un régime inférieur de 800 tr/min, le moteur développe effectivement moins de puissance.
Alors, pourquoi une telle pantalonnade ?
Les vraies raisons sont assez floues, mais de l’avis général, ce sont les compagnies d’assurance qui sont les principales responsables. Replaçons-nous dans le contexte automobile de l’époque aux Etats Unis. Les muscles cars sont à leur apogée et les puissances se sont littéralement envolées, dépassant les 400 HP sur des voitures qui sont, disons-le clairement, incapables de gérer un tel déferlement avec un minimum de sécurité. Ce phénomène, s’ajoutant à la mode des courses de rues particulièrement prisées par les jeunes Américains, affole les assureurs. Que font les assureurs lorsqu’une catégorie d’usagers leur semble être un « mauvais risque » ? Ils augmentent les primes ! Suffisamment pour leur assurer des bénéfices jugés corrects … ou pour éradiquer la catégorie considérée. C’est ce qui s’est passé pour les muscles cars, que les primes d’assurance ont exterminées.
Le paradoxe dans cette histoire, c’est que la Corvette n’est pas, et n’a jamais été, une muscle car ! Il n’y a pas de commune mesure entre une C2 avec ses suspensions indépendantes, ses freins à disques, son poids contenu et son centre de gravité très bas, et une berline ou un coupé classiques contemporains. De plus, à cause de son prix supérieur, la Corvette ne s’adresse pas à une clientèle jeune et – relativement – désargentée.
Cinquante ans ce sont écoulés, le secret de Polichinelle n’en est plus un pour personne et pourtant l’omerta règne toujours sur la communication de General Motors. Il n’existe aucune trace du L72 450 HP dans les documents officiels !
Quand je vous disais que la puissance d’une Corvette est une notion difficile à caractériser avec précision !